En 2017, Real s’est associée à des institutions québécoises de premier plan pour lancer Orbit, un fonds visant à prêter main-forte aux jeunes entreprises ambitieuses aux premiers stades de leur développement. La vision d’investissement de ce fonds s’articule autour de l’excellence locale. Compte tenu du dynamisme des universités québécoises, nous étions convaincus que les entreprises misant sur des technologies de pointe (ou « deep tech »), c’est-à-dire des solutions de rupture fondées sur des percées scientifiques ou technologiques uniques, protégées ou difficiles à reproduire, pourraient représenter le pilier de notre portefeuille.
Trois ans plus tard, on peut affirmer que nous avons bien fait de nous fier à notre intuition. Orbit a réalisé une douzaine d’investissements dans toutes sortes de domaines : biotechnologie, énergie, informatique quantique, semiconducteurs, robotique, agrotechnologie et neuroscience. La création de notre portefeuille et l’accompagnement des jeunes entreprises technologiques de pointe ont été des expériences très enrichissantes à bien des égards. Ce billet souligne les motivations derrière ces investissements et des leçons que nous avons tirées en aidant nos entreprises.
Pourquoi les technologies de pointe?
Chez Real, nous sommes convaincus que ces technologies ont un potentiel unique sur le plan du rendement des capitaux investis en plus de s’attaquer à des problèmes pressants qui affectent la société. En alliant le pouvoir du numérique au monde physique, les entreprises technologiques de pointe peuvent apporter des solutions en matière d’efficacité énergétique, de durabilité alimentaire et de prévention des maladies, des défis majeurs auxquels l’humanité est confrontée. Comme il s’agit de problèmes nouveaux et difficiles à résoudre, ces entreprises ont souvent besoin de mobiliser beaucoup de capitaux et peuvent rencontrer des obstacles dans les efforts de mise en marché de leur solution. Les entreprises qui réussissent à se démarquer et qui font breveter des produits difficiles à reproduire peuvent toutefois arriver à créer un énorme fossé avec la concurrence. Les entreprises technologiques de pointe excellent par ailleurs à maximiser leur avantage à long terme en gagnant l’appui des gouvernements et de la population.
Ayant à cœur les investissements locaux, nous croyons que les technologies de pointe représentent l’une des plus grandes ressources du Canada. La réputation des universités canadiennes est d’ailleurs bien établie. Cette notoriété s’étend d’un océan à l’autre, mais est particulièrement grande au Québec. McGill et l’UDeM, qui sont classées parmi les 100 meilleures universités au monde, mènent le bal grâce aux nombreux talents qu’elles diplôment et à la recherche de pointe qui y est effectuée dans plusieurs domaines. L’Université Concordia, l’ÉTS, l’Université de Sherbrooke, l’UQAM et l’Université Laval offrent également des programmes renommés en science, génie et administration des affaires. La concurrence économique mondiale se faisant de plus en plus forte, ces universités continueront d’assurer un avantage concurrentiel au Québec et au pays dans son ensemble.
En plus de l’attrait qu’elles exercent dans ce secteur, les universités canadiennes se signalent maintenant par leur capacité à bâtir des écosystèmes d’entreprises technologiques de pointe par l’entremise d’accélérateurs et d’incubateurs. L’exemple le plus notable est le Creative Destruction Lab, qui a été lancé à la Rotman School de l’Univesité de Toronto et qui est maintenant présent sur la scène mondiale dans neuf universités, dont HEC Montréal. Plusieurs écoles du Québec ont également apporté leur pierre à cet édifice. Centech, un incubateur fondé par l’ÉTS et axé sur les technologies de pointe fait maintenant partie du top 20 des incubateurs universitaires les plus performants au monde. La Coupe Dobson et l’accélérateur X1 de McGill, l’ACET de l’Université de Sherbrooke et D3 de l’Université Concordia ont tous un excellent bilan en matière de technologie de pointe. Quant à Front Row Ventures, le fonds de Real dirigé par des étudiants, il est présent sur 20 campus au Québec et en Ontario. Plusieurs jeunes entreprises technologiques de pointe ont bénéficié de leur aide dans ces deux marchés.
Leçons apprises
Les entreprises technologiques de pointe doivent relever des défis bien particuliers, notamment la création de leur équipe et la protection de la propriété intellectuelle, sans oublier la mise au point et la commercialisation de leur technologie. Nous ne cessons d’apprendre depuis les trois dernières années, mais certaines tendances semblent se dégager chez les entreprises qui réussissent. En voici quelques-unes qui sont dignes de mention. Nous espérons qu’elles seront utiles aux autres entrepreneurs et investisseurs qui se consacrent corps et âme à leur entreprise.
1. Acquisition de nouvelles compétences ou embauche de spécialistes
La plupart des entreprises technologiques de pointe sont mises sur pied par des scientifiques ou des chercheurs. Ils ont bien sûr l’expertise nécessaire à la conception de leur produit, mais ce n’est pas forcément le cas lorsque vient le temps de le promouvoir leur projet ou de développer l’équipe. Pour pallier ces lacunes, les entrepreneurs ont deux choix : acquérir de nouvelles compétences ou s’entourer de spécialistes des affaires. Selon notre expérience, ces deux options se valent. Tout dépend des intérêts et de la disposition des membres de l’équipe. Quelle que soit la voie empruntée, les entrepreneurs doivent bien mesurer les forces et leurs faiblesses afin de prendre des décisions qui ouvrent la voie au succès de l’entreprise à long terme.
2. Compensation équitable pour l’université
Les entreprises technologiques de pointe prennent souvent naissance dans un milieu de recherche. L’université reçoit normalement des redevances ou parfois un rendement des capitaux propres en guise de compensation. Le sujet des licences universitaires pourrait à lui seul faire l’objet d’un billet entier. En ce qui nous concerne, le message important est simple : peu importe l’entente, elle doit être structurée de manière à favoriser la croissance de l’entreprise et son succès commercial. Dans les cas où ces conditions ne sont pas réunies, nous avons constaté qu’il était possible de renégocier, pourvu que l’entreprise soit patiente et que la négociation ait lieu de bonne foi.
3. Rôle stratégique des chaînes d’approvisionnement
De nombreuses entreprises technologiques de pointe fabriquent du matériel, ce qui s’accompagne d’une multitude de défis en matière de conception de produits. L’un des défis qui reviennent le plus souvent chez les entreprises de notre portefeuille est la gestion du réseau de fournisseurs et de partenaires dans la chaîne d’approvisionnement. Maintes et maintes fois, les problèmes de fiabilité des fournisseurs et de disponibilité des composantes clés ont eu une incidence sur la disponibilité des produits et donc sur les résultats commerciaux. Pour limiter le risque de problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement, nous conseillons aux entrepreneurs de choisir leurs partenaires au terme d’une évaluation rigoureuse, de se doter de fournisseurs de réserve et de tenir compte du scénario du pire retard possible lors de la commande des pièces.
4. Aide gratuite
En comparaison des logiciels traditionnels, les technologies de pointe peuvent être très coûteuses à mettre au point. Pour adoucir le coup et prolonger la marge de manœuvre, les entreprises de haute technologie devraient tirer pleinement parti des options de financement non dilutives. Il existe plusieurs options de financement. Par exemple, certaines entreprises trouvent des moyens d’utiliser les laboratoires universitaires et la main-d’œuvre qui y travaille. D’autres se tournent vers certains programmes de subvention. Au Canada, les entreprises du domaine des technologies de pointe peuvent notamment bénéficier grandement du Programme d’aide à la recherche industrielle du CNRC et des crédits en R-D, ainsi que de l’aide d’institutions comme MITACS et MILA, qui facilitent l’accès aux chercheurs universitaires. Quelle que soit l’approche, une stratégie bien orchestrée et non dilutive peut donner des résultats impressionnants. Certaines de nos entreprises technologiques de pointe ont d’ailleurs recueilli jusqu’à deux dollars en financement non dilutif pour chaque dollar de capitaux propres.
5. Des syndicats solides et bien gérés
Nous sommes persuadés que de solides syndicats de placement sont importants pour toutes les entreprises en phase de préamorçage. Mais pour les entreprises de haute technologie, un groupe complémentaire d’investisseurs peut être particulièrement utile compte tenu des défis techniques et commerciaux uniques qui les caractérisent. Si un domaine compte des investisseurs œuvrant dans un marché vertical, il peut s’agir d’un bon filon. Par contre, un groupe diversifié d’investisseurs généralistes motivés peut également avoir un impact important, chaque investisseur ayant son propre réseau et point de vue. Une fois qu’un solide syndicat est formé, nous recommandons à tous les entrepreneurs d’organiser des rencontres trimestrielles avec les investisseurs afin de tenir le groupe informé et engagé. En plus d’offrir une structure de gestion, ces rencontres peuvent aider les entrepreneurs à sortir du train-train quotidien et à penser stratégiquement à l’entreprise. Elles favorisent également la transition vers les réunions plus officielles du conseil, qui auront lieu lorsque l’entreprise sera plus mature.
6. Quelle que soit la technologie, c’est l’entrepreneur qui fait la différence
C’est un lieu commun qui est tout aussi vrai dans les technologies de pointe : tout dépend de l’entrepreneur. En tant qu’investisseurs, nous offrons du soutien et des conseils, mais ce sont les entrepreneurs qui réalisent les prouesses technologiques. Ce n’est évidemment pas une révélation, mais c’est une occasion idéale pour saluer le travail de nos incroyables entrepreneurs dans le domaine des technologies de pointe. Merci aux équipes de Biointelligence, Drop Genie, Eno, Invivo.AI, MIMs, Nectar, Nplex, Omnirobotic, Ossiaco, Sollum, Spark Microsystems, YPC et à celles pour qui les investissements n’ont pas encore été annoncés. Nous sommes reconnaissants d’avoir la chance de travailler avec vous.
Un avenir prometteur
Grâce au dynamisme de l’écosystème et à l’appui inébranlable des universités et du gouvernement, et compte tenu du nombre sans cesse grandissant de problèmes à résoudre, nous croyons que les technologies de pointe continueront de s’épanouir au Québec et partout au Canada. Comme vous pouvez vous en douter à la lecture de ce billet, nous sommes très heureux de pouvoir apporter notre contribution et d’aider la prochaine génération d’entrepreneurs dans le domaine des technologies de pointe. Si vous en faites partie, faites-nous savoir où vous en êtes!
Merci à Alan Macintosh, Eloise Flesh, Janet Bannister, Laura Easton, Lauren Heller, et Daniel Souweine pour leur aide et leurs commentaire.
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